C'est un réel plaisir de vous présenter l'ouvrage fraîchement paru de l'un des premiers lecteurs du blog, Rémi Jimenes. Son ouvrage Les Caractères de civilité, Typographie et calligraphie sous L'Ancien Régime, vient effectivement de paraître à éditions Atelier Perrousseaux Editeur (29,50€), et il est superbe.
J'ai déjà eu l'occasion de le feuilleter pendant toute une soirée et j'attends avec impatience d'avoir un peu de temps pour me plonger dans ce qui me semble déjà être un nouvel ouvrage de référence sur le sujet. Mais pour vous donner une première impression, c'est vraiment très très intéressant même pour le non spécialiste que je suis. C'est très bien écrit, et on se laisse porter par l'histoire dans l'Histoire. J'aime beaucoup.
Rémi étant un fidèle du blog, il a accepté de se prêter au petit jeu de l'entretien pour les lecteurs du blog, afin de nous en dire plus sur lui, ses recherches et son ouvrage.
Rémi, quel a été ton parcours jusqu'à la parution de l'ouvrage?
Après deux années de khâgne à Orléans et une licence d'histoire, je me suis orienté vers un master en histoire du livre à Tours, au Centre d’études supérieures de la Renaissance. J’y ai consacré mon mémoire à la carrière de Charlotte Guillard, veuve des imprimeurs Berthold Rembolt et Claude Chevallon. Je poursuis aujourd’hui cette recherche en doctorat. Parallèlement je collabore au projet de numérisation des Bibliothèques Virtuelles Humanistes.
Comment l'idée de cet ouvrage a-t-elle germé?
À la fin de l’année 2009, j'ai été mis en contact avec Yves Perrousseaux, qui recherchait des photographies pour illustrer son Histoire de l'écriture typographique. Comme je m'intéressais à l’histoire de la calligraphie, il m'a demandé quelques renseignements sur le sujet, avant de me proposer la rédaction d'un livre consacré aux rapports entre typographie et calligraphie. Ce vaste sujet dépassait de loin mes modestes compétences. Cependant, depuis plusieurs années je rassemblais de la documentation sur les caractères de civilité. J’ai donc proposé à Yves d’aborder les rapports entre typographie et calligraphie à travers l’histoire de la lettre de civilité.
Mais que sont les caractères de civilité ?
Gravés par Robert Granjon en 1557, les caractères de civilité imitent la gothique cursive des secrétaires français de la Renaissance.
Cette typographie est surtout connue pour l’utilisation qu’en ont faite les imprimeurs aux XVIIIe et XIXe siècles : le caractère ne servait plus alors qu’à imprimer des manuels de savoir-vivre et de bienséance, qui ont donné leur nom à cette typographie. Mon livre rejoint ceux d'Yves Perrousseaux dans la collection « Histoire de l'écriture typographique ». Cette collection, bien connue des amateurs comme des professionnels, rassemble des ouvrages de référence copieusement illustrés. Les derniers volumes sont tous imprimés en quadrichromie.
L'ouvrage est en effet magnifique, qu'apporte-t-il à l'histoire des caractères de civilité?
Plusieurs auteurs s'étaient auparavant intéressés à l’histoire des caractères de civilité. En 1966, Harry Carter et Hendrik Vervliet ont publié en anglais un livre entièrement consacré au sujet. Leur livre, qui recense les polices gravées à la Renaissance et étudie leurs origines, demeure une référence incontournable. Il n'était bien sûr pas question pour moi de « refaire » le Carter-Vervliet, mais d’adopter une approche différente du sujet : d'une part, en ne m'intéressant pas exclusivement au graphisme des caractères mais à leur utilisation par les imprimeurs (pour quels textes?) et à leur réception par le public (avaient-il du succès?) ; et d'autre part, en élargissant le cadre chronologique de cette enquête.
On connaît bien l’histoire de l’invention de cette typographie, mais on n’avait pas encore regardé précisément ce qu'elle devenait aux XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cet élargissement du cadre chronologique m’a permit de montrer que les caractères de civilité disparaissent totalement des presses françaises dans la seconde moitié du XVIIe siècle, pour ne réapparaître qu'en 1703 avec la publication des Règles de la Bienséance et de la Civilité chrétienne de Jean-Baptiste de La Salle.
Il m’a alors paru intéressant d'interroger les causes de cette disparition et les raisons de la «résurrection» de cette typographie en 1703. Malgré leur apparent archaïsme, les caractères de civilité étaient employés pour des motifs pédagogiques clairement définis.
Un autre volet important de mon travail est sans doute la mise en relation de la typographie avec l’histoire de la calligraphie. La variation des modes calligraphiques en France du XVIe au XIXe siècle, le passage de l'écriture gothique à la ronde, puis de la ronde à la coulée et enfin à l'anglaise, a naturellement affecté l'utilisation des caractères de civilité qui servaient non seulement pour l’apprentissage de la lecture, mais également pour l’apprentissage de la calligraphie. J’ai ainsi volontairement profité de l’occasion pour donner quelques précisions sur l’histoire, finalement mal connue, de la calligraphie française sous l’Ancien Régime.
Je présente également quelques modèles d’écriture tirés non pas des grands manuels d’Alais de Beaulieu, Saintomer ou Royllet, ces rolls-royce de la calligraphie, mais tirés de petites brochures rares et peu connues, celles qu’avaient précisément dans les mains les enfants des classes populaires.
Le Bibliomane moderne (blog)Rédigé le Lundi 18 avril 2011
Le Bibliomane moderne (blog)
La sortie du beau livre de Rémi Jimenes sur les caractères de civilité était attendue avec impatience par de nombreux bibliophiles. Il vient heureusement compléter la série d’ouvrages d’Yves Perrousseaux sur l’histoire de la typographie.
La tâche était ambitieuse, aucun ouvrage en langue française de cette ampleur n’avait encore couvert le sujet, un comble pour un art typiquement français !
Sa lecture est un vrai plaisir ; on y apprend des tas de choses sur les « lettres françaises d’art de main », des origines à ses développements successifs (je dirais même ses mutations) jusqu’au XIXe siècle. On savait le style de ces caractères dérivé des écritures de chancellerie. Une nostalgie de copiste, pourriez-vous penser, que nenni ! Il s’agissait, au contraire, d’une volonté délibérée des humanistes de la Renaissance de « faire moderne » et d’affirmer la grâce et le caractère (c’est le cas de le dire !) des lettres françaises sur les italiennes.
Si Geoffroy Tory, le précurseur, défend la langue française, qui n’a rien à envier en beauté à la latine, c’est pourtant aux caractères romains qu’il s’attache à fixer les justes proportions. Il avait bien envisagé de traiter en parallèle des lettres françaises: « Si j’eusse pu trouver mention par écrit de nos susdites lettres de forme et bâtardes … je les eusse mis en ordre selon leur due proportion ». Et oui, seulement, il ne risquait pas d’en trouver en 1529, le bougre, puisque c’est Robert Granjon, en 1557, qui, le premier, publia un ouvrage en cursive gothique !
A l’origine de toute typographie il y a une écriture manuscrite que le graveur prend pour modèle, le style italique de Griffo des éditions aldines cherchait aussi à se rapprocher de l’art inimitable de la main. Mais les caractères de civilité se rapprochent plus fidèlement encore de la souplesse des lettres cursives ; à l’origine, ce sont des variantes de la gothique bâtarde (ce qui est plutôt paradoxale car l’écriture gothique n’était plus à la mode depuis quelques décennies, au point que Pétrarque écrivait déjà qu’elle avait été inventée pour autre chose que pour être lue !). Ensuite, il faut un modèle, les Maitres d’écriture royaux sont de bons candidats ; Pierre Habert, calligraphe et valet de chambre du Roi, a pu inspirer Granjon, tandis que Pierre Hamon, calligraphe réputé, a inspiré Philippe Danfrie.
Il faut avoir l’œil exercé pour distinguer tel type à tel autre, mais comme les autres ouvrages de la série, celui-ci est très pédagogique et il vous donne l’inventaire des différents types, comme ceux de Granjon, par exemple : les capitales, les bas de casse, les ligatures, les finales. Voilà l’art de main décodé !
Cette nouvelle typographie sera contrefaite malgré le privilège dont bénéficie Granjon pour 10 ans, et se diffusera rapidement, en France mais aussi à l’étranger, notamment dans les pays du Nord. Pourtant, le caractère de civilité ne parviendra jamais à supplanter les lettres romaines. Il est d’un usage plus difficile pour l’imprimeur, et le crénage des types les rend fragiles à la presse.
Ce que le livre de Rémi Jimenes montre bien c’est la fortune en dent de scie de cette typographie. A la mode de 1560 à 1620, elle disparait presque complètement au XVIIe siècle, pour revenir en force au début du XVIIIe siècle. Seule exception confirmant la règle, le météore Pierre Moreau, qui invente une nouvelle typographie tirée des arts de la main, selon une démarche proche de celle de Robert Granjon. Mais il appartient à la corporation des Maitres-écrivains et non à celle des imprimeurs et son expérience sera vite brisée par ces derniers.
Le gothique cursif s’offre donc un come back tonitruant dans les années 1730 grâce à Jean Baptiste de la Salle, le fondateur des Ecoles Chrétiennes, qui publie en 1703 Les Règles de la Bienséance et de la Civilité Chrétienne. Cette fois le pli est pris, il deviendra difficile ensuite de publier un livre de civilité qui ne soit pas composé avec ces caractères, sauf bien plus tard, lorsque les éditeurs ne verront plus de motifs à suivre un style que plus personne n’utilise et ne lit facilement. C’est l’âge d’or de la civilité, plus de 200 ouvrages ont été comptabilisés entre 1703 et 1863 !
Les lettres sages et bien alignées de Granjon et de ses suiveurs étaient principalement réservées aux textes officiels, aux ordonnances, privilèges et autres épitres dédicatoires, mais le Gothic Revival de la période suivante touchera surtout les éditions populaires et la production de colportage : mauvais papier, souvent manipulés par les enfants, reliures modestes (si on excepte le maroquin bleu de Duru pour l’exemplaire du Baron Pichon des Règles de la Bienséance !). Ces manuels faisaient coup double, celui d’enseigner les règles de savoir-vivre en même temps que l’écriture manuscrite. L’ouvrage montre bien les cousinages entre la typographie de civilité et les manuels de calligraphie destinés à enseigner l’art de bien former les lettres, la ronde et la bâtarde.
On regrette juste que cette partie consacrée aux productions proprement calligraphiques des Maitres-écrivains, les Louis Senault, les Honoré-Sébastien Roillet, etc, ne soit pas plus développée. Sans doute par ce que leurs ouvrages étaient plus souvent gravés que typographiés.
A la fin de l’ouvrage un appendice donne un inventaire utile des principales éditions de livres scolaires rédigés avec des caractères de civilité, depuis les Règles de la Bienséance de JB de la Salle, pour qui voudrait commencer une collection de ces impressions pittoresques.
Impossible de traiter sur une seule page, fut-elle internet, de toute la richesse du livre de Rémi Jimenes, Le mieux reste de le lire. Bon, je vous laisse, et j’y retourne…
Les rapports qu’entretiennent l’écriture manuscrite et la typographie – en un constant jeu d’imitation, de rapprochement et de stylisation sont un terrain d’étude ancien mais où de nombreux travaux restent à mener. Ce que nous appelons depuis bien longtemps « caractère de civilité », par facilité , et qui n’est autre qu’une cursive gothique, aurait pu à cet égard sembler bien connue après plusieurs études de qualité tout au long des XIXe et XXe siècles. Rémi Jimenes renouvelle cependant les connaissances en étudiant ces caractères non d’un point de vue typographique mais de celui de leur emploi, par une approche diachronique, relevant à la fois de la bibliographie matérielle et de la sociologie de l’écrit.
L’auteur démontre en effet que ce caractère a eu une vie mouvementée. Loin d’avoir été utilisée sans interruption pendant plus de trois siècles comme on le croyait, la lettre de civilité a connu des périodes d’abandon et de retour en usage. Le caractère est créé en 1557 par un imprimeur lyonnais, Robert Granjon, qui cherche alors à imiter l’écriture des secrétaires français : il s’agit d’une écriture extrêmement cursive, qui nécessite l’emploi d’un grand nombre de ligatures. Cette « lettre françoise d’art de main » est protégée par privilège mais se diffuse néanmoins très rapidement : en 1600, toute l’Europe l’utilise. L’auteur propose un certain nombre d’exemples pour déterminer quel usage est fait de ce caractère : poésies, imprimés officiels, usages en lien avec la langue française par opposition aux autres, ouvrages de civilité proprement dits et autres ouvrages scolaires – puisque l’intérêt de cette écriture devait résider dans sa grande lisibilité.
Le reflux de l’usage du caractère est aussi brusque qu’avait été sa diffusion. Dans le contexte général de la disparition des caractères gothiques, le caractère de civilité ne trouve plus sa place, d’autant que les écritures manuscrites ont-elles-mêmes évolué : si l’on veut que la typographie ressemble à l’écriture de tous les jours, ce n’est plus la civilité qu’il faut utiliser. La connotation protestante de cette écriture (au XVIe siècle) ne facilite pas son maintien en vigueur.
Contre toute attente, le caractère de civilité connaît toutefois une seconde vie aux XVIIIe et au début du XIXe siècle. Jean-Baptiste de La Salle, fondateur des Frères des écoles chrétiennes, publie en 1703 les Règles de la bienséance et de la civilité chrétienne, qui remet au goût du jour une police qui n’est plus utilisée depuis près de cinquante ans. Rapidement, la lettre de civilité passe pour le caractère typique des manuels scolaires… et prend le nom dont on le désigne couramment. L’auteur recense plus de 200 éditions d’ouvrages de ce type avec un pic dans les années 1810-1830 : étrange retour de la typographie gothique au temps des Lumières… Le phénomène est même général ; Rémi Jimenes démontre que ce retour ne dépend pas de quelques imprimeurs ou n’est pas limité à quelques villes mais est visible dans l’ensemble des centres d’impression du territoire français. Devenu à peu près illisible car trop éloigné des habitudes du temps, le caractère finit par disparaître au milieu du XIXe siècle… bien qu’il soit encore utilisé de nos jours comme caractère exotique.
Les éditions Atelier Perrousseaux, qui nous ont déjà gratifiés de deux superbes volumes d’une Histoire Typographique qui est devenu un ouvrage de référence incontournable sur le sujet, viennent de faire paraître un nouvel ouvrage sur un sujet fort peu traité par les historiens de la typographie, j’ai nommé la « lettre française d'art de main » ou « lettre façon d'écriture », plus connue sous le nom de « lettre de civilité ». À la frontière de la typographie et de la calligraphie, ces lettres sont calquées sur une des cursives de l’époque et servaient à imprimer notamment des manuels éducatifs. On les composait dans ce caractère bien particulier en se disant qu’il était plus facilement lisible à l’âge où l’on apprend à lire et à écrire justement cette cursive scolaire. En dehors de l’ardu problème typographique qui consiste à rendre par des rectangles de plomb toutes les subtilités d’une cursive avec ligatures, trait continu et caetera, ces lettres sont très esthétiques et loin, dans leurs formes, des caractères romains et italiques auxquels une typographie plus classique nous a habitués et plus proches d'une cursive gothique que nous étudierons bientôt chez Graphos.
Découvrez donc dans cet ouvrage les liens qui ont perduré tardivement entre typographie et calligraphie, les influences réciproques (si, si) entre ces deux modes de production du texte écrit, cela vous donnera bien des idées et des modèles desquels vous inspirer pour calligraphier ce caractère un peu oublié du corpus calligraphique habituel. Les nombreuses illustrations sont accompagnées d’un texte remarquable de Rémi Jimenes qui met parfaitement en valeur à la fois la naissance, l'évolution et l’utilisation typographique de ce caractère mais aussi les influences de et sur la calligraphie de cette cursive, bien loin des modes d'inspirations qu’y puiseront plus tard Hermann Zapf ou Alan Blackman.
Bref, pour une fois un ouvrage qui met en lumière les nombreuses interrelations entre typographie et calligraphie et une bien belle source d’inspiration pour nous autres scribes.
>[Sylvie Litté]
Histoires du livre (blog)Rédigé le Samedi 30 avril 2011
Histoires du livre (blog)
Il est bien trop rare que les éditeurs modernes –entendons, les éditeurs d’aujourd'hui– accordent suffisamment d’importance à la «mise en livre» des manuscrits qui leur sont confiés. Pourtant, les travaux d’histoire du livre montrent bien non seulement que le texte ne saurait exister seul, mais que le livre en tant qu’objet apporte au lecteur, par les dispositifs matériels qu’il met en œuvre, bien autre chose que le seul texte. «Mettre en livre» avec compétence et élégance un livre qui traite précisément d’un aspect de la «mise en livre», à savoir l’histoire du caractère typographiques, est tout particulièrement bien venu.
On ne peut par conséquent qu’être reconnaissant à l’éditeur Atelier Perrousseaux de l’ouvrage que Rémi Jimenes a consacré aux Caractères de civilité d’avoir réussi à nous offrir un livre dont l’élégance formelle se combine avec un contenu textuel de qualité. L’étude de la typographie et des caractères reste trop peu développée en France, et encore mal intégrée aux travaux d’histoire générale du livre –une exception remarquable étant bien évidemment celle du Musée de l’imprimerie dirigé par Alan Marshall à Lyon. L’exposition d’Écouen sur Geoffroy Tory et son Champfleury constitue aussi, en ce moment même, une excellente occasion d’approcher ce domaine.
Rémi Jimenes, doctorant au CESR de Tours, définit les caractères de civilité, alias lettre française d’art de main, comme « une typographie gothique reproduisant l’écriture cursive qu’employaient les hommes de plume français au milieu du XVIe siècle » (p. 10). Histoire et civilisation du livre donnera de cet élégant volume un compte rendu circonstancié, mais le sommaire que nous publions ci-dessous donne une bonne image d’un contenu présenté à la manière d’une pièce de théâtre classique.
Il y a quelques temps est sorti un très bel ouvrage intitulé : « François Boltana & la naissance de la typographie numérique ». Ses deux auteurs : Frank Adebiaye & Suzanne Cardinal ont ainsi réalisé un véritable travail d’enquête autour de ce passionnant acteur de la typographie. Publié à l’Atelier Perrousseaux (Adverbum, octobre 2011), l’ouvrage que j’ai pris soin de lire est divisé en plusieurs parties : introduction, calligraphie & les années de formation, le phototitrage, l’informatique, la synthèse humaniste, l’héritage de François Boltana, Verbatim(ligatures & calligraphie assistée par ordinateur)et aux couleurs de François Boltana(partie avec des photographies couleurs).
L’ouvrage très complet se veut simple, élégant et s’avère être très généreux en images, en textes en anecdotes aussi. Cela permet de connaître vraiment la vie, le travail le démarche et la réflexion de ce typographe hors du commun et qui mérite vraiment à être connu. D’ailleurs, si les petits noms de Geneviève, Lineameca, Gyrus, Capitole, Aurore ou encore Toulouse vous disent quelque chose… c’est que vous connaissez déjà le travail de Boltana
Présentation officielle :
« François Boltana (1950-1999) aura peut-être vécu la typographie à son instant le plus décisif, au moment où les promesses multiséculaires qu’elle portait en elle purent vraiment se concrétiser. La France des années 1950 dans laquelle il naît connaît une période de renouveau typographique sous l’impulsion de personnalités comme Roger Excoffon ou Adrian Frutiger, sur fond de concurrence exacerbée entre les fonderies Olive et Deberny & Peignot. François Boltana aura traversé comme un météore la galaxie typographique. Élève du Scriptorium de Toulouse à 18 ans, il publie ses premiers caractères dans la prestigieuse maison Hollenstein dès l’âge de 22 ans et son premier caractère international à 23 ans chez Letraset, le Stilla, qui incarne à lui tout seul le psychédélisme débridé des années 1970, en plein âge d’or de la photocomposition.
François Boltana a ouvert la voie de l’électro-typographie moderne, alliant l’élégance de la geste calligraphique à une virtuosité technique et technologique inédite jusqu’alors. Véritable « type geek » avant la lettre, il décode en 1989 la calligraphie prodige de l’Anglais Joseph Champion et en propose l’année suivante une version complète et informatisée – c’est l’OpenType avant la lettre. Il fut aussi parmi les tout premiers créateurs de caractères à vendre directement ses polices de caractères, ouvrant la voie à la typographie indépendante telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Cet ouvrage propose de vous raconter le destin fascinant de ce créateur méconnu qui a pourtant su, parmi les premiers, allier la maîtrise de la calligraphie à l’aisance technologique dans la plus grande tradition de la lettre latine. »
L’interview d’un des auteurs, Frank Adebiaye :
Bonjour Frank Adebiaye et merci de m’accorder ton temps pour cette petite entrevue Le sujet de cette interview va tourner autour de ton livre mais avant, j’aurais aimé que tu te présentes tout d’abord aux lectrices & lecteurs de Graphism.fr.
« Je suis comptable-typographe. Je me suis passionné pour la typographie dès 1999. J’ai organisé une conférence sur la typographie en 2003 avec Jean-François Porchez dans mon école (Reims Management School). Puis j’ai beaucoup lu et écrit sur la typographie (sur mon blog Velvetyne de 2006 à 2010, sur feu le typographe, dans la revue Graphê, dans mon fanzine le Rhino) avant de monter ma propre fonderie de caractères VTF en 2010 et de publier deux livres sur la typographie en 2011, l’un sur François Boltana qui fait l’objet de la présente interview et l’autre, écrit collectivement, sur les fontes libres pour le compte de l’Organisation Internationale de la Francophonie. Je suis également intervenu à deux reprises aux Rencontres Internationales de Lure en 2008 et 2011. »
Tu as écrit ce livre sur François Boltana avec Suzanne Cardinal, pourrais-tu la présenter également et me raconter l’histoire qui vous a réuni autour d’un tel projet ?
Suzanne Cardinal est étudiante en graphisme et en édition aux Arènes à Toulouse. Nous sommes rencontrés autour de ma fonderie et de la publicité que j’avais fait paraître en novembre 2010 dans Étapes. Elle m’a dit s’intéresser à mes caractères typographiques ; la sachant à Toulouse et la sentant dynamique et enthousiaste, je lui ai proposé de me rejoindre sur le projet, que je venais seulement d’entamer.
Votre choix s’est porté sur François Boltana. Pourquoi ce personnage et pourquoi en faire un livre ? Avez-vous hésité avec un autre typographe ?
« J’ai découvert le travail de François Boltana dans les Cahiers Gutenberg (une gazette publiée par l’association Gutenberg autour du logiciel LaTeX, logiciel de composition typographique et scientifique ; ) en 2004. J’ai été alors stupéfait par son travail incroyable sur les ligatures (cette fusion élégante entre plusieurs lettres pour des raisons esthétiques comme pour le « ? » ou linguistiques comme le « œ », sur les anglaises (aux formes très calligraphiques et très contrastées, dessinées à la plume Sergent Major) et j’ai été encore plus abasourdi en apprenant que François Boltana était complètement tombé dans l’oubli. Le dévolu que j’ai jeté sur François Boltana n’était pas fortuit, loin de là, car je sentais que c’était grâce à des visionnaires comme lui, que des gens comme moi (comprendre : des autodidactes, venant à la typographie par l’informatique) ont pu avoir accès à ce « vieil art » de la typographie. Ironie de l’histoire : François Boltana est mort en 1999, l’année même où je commençais à me plonger dans le monde de la typographie, en m’extasiant sur le moteur typographique « révolutionnaire » d’InDesign, dont la tout première version devait sortir la même année. Je dois avouer que mon intuition n’a pas été déçue, bien au contraire, car à la figure du visionnaire s’est ajouté la personnalité hors du commun d’un personnage attachant. »
Le livre retrace très bien la vie et les inspirations de Boltana. Est-ce pour toi un modèle de réussite ? De courage ? Boltana a-t-il connu des « ratés » dans son parcours ?
« Comme le suggère assez la citation d’Hippocrate placée en exergue à la conclusion de l’ouvrage, la vie de François Boltana, au-delà de son parcours typographique, est une véritable leçon de vie. Il y avait en lui un sentiment d’urgence de la création, cette volonté farouche de s’en sortir et un immense courage. De ce point de vue, François Boltana est un modèle de réussite, même si, comme le tout le monde, il avait sa part de doute. Plus que de « ratés », je parlerais davantage d’un gigantesque rendez-vous manqué avec l’histoire très récente de la typographie qui lui a largement donné raison : il a été un précurseur de l’OpenType, de la fonderie personnelle et indépendante, du souci de protéger son travail de créateur et d’auteur. Certaines de ses formes ressurgissent. Je pense au Lineameca (voir page 24) que l’on retrouve dans le Cholla Slab, de l’Oscar (voir page 57) que l’on retrouve dans le FF Ernestine, sans parler du Stilla (voir page 31), en pleine actualité quand on voit la résurgence des normandes, ces grasses et généreuses didones. »
Retrouver le travail de Boltana, le mettre en forme, prendre du recul par rapport à son oeuvre, marcher sur ses traces, quelles ont été les principales difficultés dans l’écriture de ce livre ? Quelle a été ta/votre plus grande victoire ?
« La tâche la plus ardue a été de retrouver le travail de François Boltana. Pour cela, il nous a fallu gagner la confiance de la famille Boltana (en particulier sa veuve Geneviève et sa fille Sabine). D’autres initiatives ou velléités éditoriales autour de François Boltana nous avaient précédées, nous avons donc redoublé de pédagogie et d’équité pour mener à bien le projet. En parallèle et par la suite, il y a eu un travail de recherche, d’écriture suivi de relectures attentives (celles de Jean-François Porchez et de Franck Jalleau ont été tout particulièrement précieuses). La plus grande victoire a donc été de mener ce projet à bien et surtout d’observer les réactions enthousiastes qu’il a suscitées, la fierté de la famille de revoir un peu revivre François Boltana au travers de cet ouvrage et le sentiment, confirmé maintes fois depuis, d’avoir fait œuvre utile, dans un style accessible. »
L’ouvrage est très complet et très beau, les éditions Atelier Perrousseaux vous ont laissé carte blanche ? Comment votre collaboration s’est-elle passée ?
« Rien n’aurait été possible sans notre directeur de collection, David Rault. Il y a bien sûr comme dans toute collection, une charte minimale à respecter. Il y a avait une contrainte en terme de pagination. Mais j’ai eu tout latitude dans l’écriture, et ce n’est pas là chose négligeable, car je considère aussi et peut-être surtout ce travail comme un travail littéraire. Suzanne a pu donner toute sa mesure dans les interviews avec la famille et dans les prises de vue, remarquables, du travail de François Boltana dans les archives familiales. Nous avons pu grandement peser sur le graphisme de la couverture, en particulier sur cette couleur violette si particulière, qui avait un sens profond car c’est la couleur de Toulouse. Pour des raisons inhérentes à l’organisation du projet, j’ai grandement participé à la mise en page du livre. Il est assez jouissif de mettre en forme, en page, en livre son propre texte. »
J’ai beau avoir un faible pour le Stilla, j’aurais été curieux de connaître ton caractère favoris chez Boltana ?
« Le Stilla est effectivement un caractère magnifique, une madeleine de Proust des années 70 insouciantes, généreuses et psychédéliques. Mais mon caractère préféré de François Boltana, c’est le Geneviève, en hommage à sa femme. La volupté des formes, les guillemets en forme de cils (voir pages 19 et 20) tout particulièrement, sont tout simplement confondants de grâce et de beauté. »
Pour finir, deux petites questions, la première porte sur d’éventuelles anecdotes que tu n’aurais pu mettre dans le livre mais que tu as plaisir à raconter.
« Notre interview va ressembler à une interview de Michel Drucker, mais je dois bien admettre, mon cher Geoffrey, que j’aime beaucoup les chiens ( sacré Frank !). Tout comme François Boltana qui avait un chien que l’on peut voir en page 56. Il y a deux anecdotes à propos de ce chien. La première c’est que Boltana, qui était un dessinateur hors pair (un artiste total, le rapprochant d’un Eric Gill) a exécuté une caricature de son chien. Nous n’avons pas pu la présenter dans la version finale du livre, mais elle était très réussie. Et la seconde anecdote tient au nom de ce chien, entré dans la famille Boltana au début des années 1980. En écho à l’actualité politique de l’époque, François Boltana avait appelé son chien Reagan ! »
Et la seconde et dernière question est de savoir si tu envisages (seul, avec Suzanne ou d’autres acolytes) d’écrire un prochain livre ?
« Oui, tout à fait, j’ai même fait plus que l’envisager, je l’ai fait, tout récemment : il s’agit de l’annuaire 1554 de la scène typographique française vivante. C’est un livre hautement pratique, avec, en sus, un article exposant, de mon point de vue, les enjeux actuels et à venir de la typographie en France ; les curieux y découvriront également l’origine du mot « typographe ». Ce livre est d’ores et déjà en vente sur Blurb et sera présenté aux Puces Typo le 5 mai prochain. »
http://www.viscomedia.chRédigé le Mercredi 4 avril 2012
http://www.viscomedia.ch
Un excellent ouvrage propose de vous raconter le destin fascinant d’un créateur méconnu qui a pourtant su, parmi les premiers, allier la maîtrise de la calligraphie à l’aisance technologique dans la plus grande tradition de la lettre latine. François Boltana (1950-1999) aura vécu la typographie à son instant le plus décisif, au moment où les promesses multiséculaires qu’elle portait en elle purent vraiment se concrétiser.
La France des années 50 dans laquelle il naît connaît une période de renouveau typographique sous l’impulsion de personnalités comme Roger Excoffon ou Adrian Frutiger, sur fond de concurrence exacerbée entre les fonderies Olive et Deberny & Peignot. Boltana aura traversé comme un météore la galaxie typographique. Elève du Scriptorium de Toulouse à 18 ans, il publie ses premiers caractères chez Hollenstein dès l’âge de 22 ans et son premier caractère international à 23 ans chez Letraset, le Stilla, qui incarne le psychédélisme débridé des années 70, en plein âge d’or de la photocomposition.
Boltana a ouvert la voie de l’électro-typographie moderne, alliant l’élégance de la geste calligraphique à une virtuosité technique inédite jusqu’alors. Véritable «type geek» avant la lettre, il décode en 1989 la calligraphie prodige de l’Anglais Joseph Champion et en propose l’année suivante une version complète et informatisée – c’est l’OpenType avant la lettre. Il fut aussi parmi les premiers créateurs à vendre directement ses polices de caractères, ouvrant la voie à la typographie indépendante telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Caractères janvier 2012Rédigé le Mardi 10 janvier 2012
Caractères janvier 2012
Le typographe François Boltana, à l'approche de la quarantaine, en 1989, découvre la création typographique numérique. Avec le nouveau système Ikarus, qui permet de transcrire à l'écran l'esprit calligraphique de la lettre, le mouvement du trait (le ductus), il entreprend la mise au point du caractère le Champion. Il dessine à la main chacune des lettres, réalise 1500 glyphes qui sont ensuite numérisés. Il devient, alors, le père de la "calligraphie informatique .. , reçoit les prix Morizawa et Linotype en 1990, et Paris-Cité en 1991. Il affine ses recherches, dessine le Messager (1992) à la plume Sergent-Major avant de le numériser; pour l'anglaise l'Aurore, il applique des changements de couleur. En 1997, il est nommé Meilleur ouvrier de France pour la création du Rabelais. François Boltana est décédé en 1999. Les auteurs Frank Adebiaye et Suzanne Cardinal nous brossent son portrait: l'apprentissage au Scriptorium de Toulouse, le premier poste chez Albert Hollenstein (Paris), spécialiste du phototitrage à l'heure où les alphabets se calligraphiaient encore à la main. François Boltana y crée son premier caractère, le Geneviève, en 1969, et obtient son premier prix Letraset, en 1972, pour le Stilla.
Revue d'Histoire Ecclésiastique Rédigé le Mercredi 14 décembre 2011
Revue d'Histoire Ecclésiastique
Malgré les bons travaux déjà publiés sur le sujet, les caractères de civilités n'ont pas encore livré tous leurs secrets. Même si cette appellation n'est pas d'origine, elle est désormais entrée dans les usages: elle désigne une typographie gothique reproduisant l'écriture cursive répandue en France au milieu du 16e s. Tout en reprenant l'ensemble de l'histoire de cette famille de caractères, R. J. apporte surtout du nouveau en mettant en lumière la renaissance de ces caractères au 18e s. Mais pourquoi présenter un travail concernant la typographie dans une revue d'histoire ecclésiastique? Aussi curieux que cela puisse paraître, les caractères de civilité sont liés à l'histoire religieuse. Leur
premier essor a été nettement favorisé par les protestants français, comme l'avait montré Herman de La Fontaine Verwey. R. J. se contente de le rappeler assez rapidement. Par contre la renaissance du 18e s., qui n'avait jamais été mise en lumière jusqu'ici, est due a` une initiative de Jean-Baptiste de La Salle. Après les réformés, voici les catholiques qui s'emparent de cet instrument de diffusion. En fait, par son rapprochement avec l'écriture manuscrite, le caractère de civilité a été perçu par les pédagogues comme un outil performant pour l'apprentissage de la lecture et de l'écriture. Cette typographie n'a pas été réservée exclusivement aux manuels scolaires, mais ceux-ci en ont beaucoup bénéficié. De même, son usage n'a pas été exclusivement français, comme pourrait le faire croire le titre de l'ouvrage. Les caractères de civilité ont aussi été utilisés dans l'Europe du Nord, en Angleterre et surtout aux Pays-Bas. L'ouvrage très abondamment illustré se lit fort agréablement. Il révèle des aspects de la typographie largement ignorés.
Une annexe bibliographique des manuels scolaires en caractère de civilité parus entre 1703 et 1863 prouve la réalité du renouveau des caractères de civilité durant ce siècle et demi. L'A., qui aime la précision, propose en outre sur internet un index alphabétique, des addenda et errata
(http://www.adverbum.fr/telechargements-gratuits-perrousseaux.html).
Jean-François Gilmont
La monographie que David Rault consacre à Roger Excoffon n’est
pas un livre sur Roger Excoffon, c’est Roger Excoffon dans un
livre.
Artiste lui-même pluridisciplinaire (graphiste, typographe,
photographe, homme de cinéma), David Rault fait revivre sous nos
yeux l’homme Roger Excoffon, dans ses élans, ses passions, dans la
polyphonie de son immense talent.
Par le prisme de cet ouvrage grand format, accessible, précis et
richement illustrée, nous découvrons le caractère Excoffon, son
écriture, le parcours de cet auteur (typo)graphique, le chantier du
Mistral, le premier nom de l’Antique Olive, un Calypso tout à fait
fortuit ; l’Excoffon publicitaire, graphiste, visualiste dont les
travaux & les commandes laissent apparaître ici de façon
synoptique la vision d’une époque, un peu de notre histoire
contemporaine, en France tout particulièrement, mais pas
seulement.
La mise en page du livre se fait au fil des pages mise en scène
avec, en point d’orgue, un superbe cahier consacré aux
photographies que Jean Dieuzaide a fait de Roger Excoffon dans les
années 1960.
L’Excoffon de David Rault est un livre que l’on peut lire vite, à
la vitesse d’une Ferrari, image que feu Yves Perrousseaux associait
cet ouvrage, s’amusant de l’audace de sa couverture
rutilante.
Mais c’est aussi un travail que l’on peut relire avec patience, en
gourmet des vignettes et des mots. Ceux de Maximilien Vox et
Savignac en particulier sont de véritables morceaux de bravoure
littéraires, qui dépassent de loin le génie spécialisé de la
typographie et qui devraient puissamment contribuer à célébrer les
nouvelles noces de la geste excoffonienne et de l’homme de la
rue.
Yves Perrousseaux est parti trop tôt en ces jours de mai 2011,
plein de projets d‘éditions en tête. C’est à la manière d’un
témoignage que j’essaye en ce dimanche soir de me souvenir de cet
amoureux fou de la typographie. Comment fallait-il aborder ce
devoir de mémoire? Jamais évident… Je me souviens avoir rencontré
Yves
Perrousseaux à la fin des années 80, lors de ces mémorables
rencontres annuelles d’août organisées par les Rencontres
internationales de Lure. Ce lieu était un doux mélange de grands
professionnels de la typographie, d‘érudits de toutes sortes, de
jeunes étudiants, d’amateurs éclairés en soif d’apprendre,
d‘échanger. En 1989 lors d’un de mes premiers passages, je
reconnaissais en la personne d’Yves l’un de ces amateurs, j‘étais
un des ces étudiants. Nous étions tout en bas de cette
montagne, face aux Blanchard,Mandel,Richaudeau,Ponot, et ravis
d’apprendre à leur contact.
Les années passaient et en 1995, il publiait son premier manuel
de typographie composé en Sabon. Cet ouvrage n‘était
pas destiné aux professionnels du graphisme, mais plutôt aux
utilisateurs non-professionnels des outils de PAO de l‘époque. Ce fut un réel succès. De nombreuses
rééditions ont suivies (neuf éditions?).
Yves, grand amateur de typographie latine, aimait essayer des
nouveaux caractères typographiques, promouvoir les jeunes
générations que nous étions en utilisant nos fontes. Yves
utilisait avec grand plaisir dans ses mises en pages de livres de
recettes, de guides, autour de la provence (ses clients locaux) nos
créations typographiques, dont celles de François Boltana,Thierry
Puyfoulhoux, et bien d’autres comme celles d‘Éric de Berranger,Xavier Dupré, etc.
qui étaient ravis de voir enfin utilisé de beaux caractères de
textes en édition. Yves apprenait, comme nous les jeunes, malgré
l‘écart générationnel.
Vers 1997, Yves, emporté par l’enthousiasme de Gérard Blanchard, publiait l’Aide au choix de la typographie du Chancelier
des Rencontres internationales de Lure. Une somme typographique,
fournie, complète, mis en page par Blanchard lui-même sur son PC,
et recomposé par Yves Perrousseaux, le tout, composé avec un des
packs de la totale typographie, Le Monde Livre1
et Le Monde Sans que j‘étais en train de finir pour ma fonderie. Avec
le recul, il semblerait que Gérard avait réussi nous faire passer
du statut d’amateurs à celui de passionnés de typographie en nous
associant à ses “saines folies” typographiques. Dans une interview publié en 2002, Yves Perrousseaux
nous dit d’ailleurs à ce sujet: Quant à en être l’un des
piliers, c’est beaucoup dire. C’est à Lurs que j’ai appris la plus
grande partie de mes connaissances professionnelles actuelles.
C’est à mon tour de transmettre ce que les aînés m’ont transmis,
c’est tout et c’est normal. Yves est pour ainsi dire un pur
produit de l’esprit de Lurs.
Yves — lors de nos discussions téléphoniques passionnées (nous
n‘étions pas toujours d’accord et c‘était mieux ainsi, une preuve
de nos engagements pour une passion commune) — me racontait ses
nouvelles aventures d‘éditeur d’ouvrages typographiques: rencontre
avec
Frutiger, publication des
livres de Mandel, etc. Sa maison d‘édition Atelier
Perrousseaux est devenu au fil des ans l‘éditeur francophone
qu’il manquait dans notre pays. Bien plus tard, lorsque j’ai appris
qu’Yves Perrousseaux avait trouvé son successeur en la personne de
David Rault vers 2009, c‘était une excellence nouvelle pour la
continuité de son œuvre. Cette décision prend d’un seul coup
tout son sens dans ces derniers jours de mai
2011. Yves Perrousseaux restera un des acteurs majeurs de la
tradition
typographique lursienne.
Les éditions Atelier Perrousseaux, qui nous ont déjà gratifiés
de deux superbes volumes d’une Histoire Typographique qui est
devenu un ouvrage de référence incontournable sur le sujet,
viennent de faire paraître un nouvel ouvrage sur un sujet fort peu
traité par les historiens de la typographie, j’ai nommé la « lettre
française d'art de main » ou « lettre façon d'écriture », plus
connue sous le nom de « lettre de civilité ». À la frontière de la
typographie et de la calligraphie, ces lettres sont calquées sur
une des cursives de l’époque et servaient à imprimer notamment des
manuels éducatifs. On les composait dans ce caractère bien
particulier en se disant qu’il était plus facilement lisible à
l’âge où l’on apprend à lire et à écrire justement cette cursive
scolaire. En dehors de l’ardu problème typographique qui consiste à
rendre par des rectangles de plomb toutes les subtilités d’une
cursive avec ligatures, trait continu et caetera, ces lettres sont
très esthétiques et loin, dans leurs formes, des caractères romains
et italiques auxquels une typographie plus classique nous a
habitués et plus proches d'une cursive gothique que nous étudierons
bientôt chez Graphos.
Découvrez donc dans cet ouvrage les liens qui ont perduré
tardivement entre typographie et calligraphie, les influences
réciproques (si, si) entre ces deux modes de production du texte
écrit, cela vous donnera bien des idées et des modèles desquels
vous inspirer pour calligraphier ce caractère un peu oublié du
corpus calligraphique habituel. Les nombreuses illustrations sont
accompagnées d’un texte remarquable de Rémi Jimenes qui met
parfaitement en valeur à la fois la naissance, l'évolution et
l’utilisation typographique de ce caractère mais aussi les
influences de et sur la calligraphie de cette cursive, bien loin
des modes d'inspirations qu’y puiseront plus tard Hermann Zapf ou
Alan Blackman.
Bref, pour une fois un ouvrage qui met en lumière les nombreuses
interrelations entre typographie et calligraphie et une bien belle
source d’inspiration pour nous autres scribes.
>[Sylvie Litté]
Il est bien trop rare que les éditeurs modernes –entendons, les
éditeurs d’aujourd'hui– accordent suffisamment d’importance à la
«mise en livre» des manuscrits qui leur sont confiés. Pourtant, les
travaux d’histoire du livre montrent bien non seulement que le
texte ne saurait exister seul, mais que le livre en tant qu’objet
apporte au lecteur, par les dispositifs matériels qu’il met en
œuvre, bien autre chose que le seul texte. «Mettre en livre» avec
compétence et élégance un livre qui traite précisément d’un aspect
de la «mise en livre», à savoir l’histoire du caractère
typographiques, est tout particulièrement bien venu.
On ne peut par conséquent qu’être reconnaissant à l’éditeur Atelier
Perrousseaux de l’ouvrage que Rémi Jimenes a consacré aux
Caractères de civilité d’avoir réussi à nous offrir un livre dont
l’élégance formelle se combine avec un contenu textuel de qualité.
L’étude de la typographie et des caractères reste trop peu
développée en France, et encore mal intégrée aux travaux d’histoire
générale du livre –une exception remarquable étant bien évidemment
celle du Musée de l’imprimerie dirigé par Alan Marshall à Lyon.
L’exposition d’Écouen sur Geoffroy Tory et son Champfleury
constitue aussi, en ce moment même, une excellente occasion
d’approcher ce domaine.
Rémi Jimenes, doctorant au CESR de Tours, définit les caractères de
civilité, alias lettre française d’art de main, comme « une
typographie gothique reproduisant l’écriture cursive qu’employaient
les hommes de plume français au milieu du XVIe siècle » (p. 10).
Histoire et civilisation du livre donnera de cet élégant volume un
compte rendu circonstancié, mais le sommaire que nous publions
ci-dessous donne une bonne image d’un contenu présenté à la manière
d’une pièce de théâtre classique.
La sortie du beau livre de Rémi Jimenes sur les caractères de
civilité était attendue avec impatience par de nombreux
bibliophiles. Il vient heureusement compléter la série d’ouvrages
d’Yves Perrousseaux sur l’histoire de la typographie.
La tâche était ambitieuse, aucun ouvrage en langue française de
cette ampleur n’avait encore couvert le sujet, un comble pour un
art typiquement français !
Sa lecture est un vrai plaisir ; on y apprend des tas de choses
sur les « lettres françaises d’art de main », des origines à ses
développements successifs (je dirais même ses mutations) jusqu’au
XIXe siècle. On savait le style de ces caractères dérivé des
écritures de chancellerie. Une nostalgie de copiste, pourriez-vous
penser, que nenni ! Il s’agissait, au contraire, d’une volonté
délibérée des humanistes de la Renaissance de « faire moderne » et
d’affirmer la grâce et le caractère (c’est le cas de le dire !) des
lettres françaises sur les italiennes.
Si Geoffroy Tory, le précurseur, défend la langue française, qui
n’a rien à envier en beauté à la latine, c’est pourtant aux
caractères romains qu’il s’attache à fixer les justes proportions.
Il avait bien envisagé de traiter en parallèle des lettres
françaises: « Si j’eusse pu trouver mention par écrit de nos
susdites lettres de forme et bâtardes … je les eusse mis en ordre
selon leur due proportion ». Et oui, seulement, il ne risquait pas
d’en trouver en 1529, le bougre, puisque c’est Robert Granjon, en
1557, qui, le premier, publia un ouvrage en cursive gothique !
A l’origine de toute typographie il y a une écriture manuscrite
que le graveur prend pour modèle, le style italique de Griffo des
éditions aldines cherchait aussi à se rapprocher de l’art
inimitable de la main. Mais les caractères de civilité se
rapprochent plus fidèlement encore de la souplesse des lettres
cursives ; à l’origine, ce sont des variantes de la gothique
bâtarde (ce qui est plutôt paradoxale car l’écriture gothique
n’était plus à la mode depuis quelques décennies, au point que
Pétrarque écrivait déjà qu’elle avait été inventée pour autre chose
que pour être lue !). Ensuite, il faut un modèle, les Maitres
d’écriture royaux sont de bons candidats ; Pierre Habert,
calligraphe et valet de chambre du Roi, a pu inspirer Granjon,
tandis que Pierre Hamon, calligraphe réputé, a inspiré Philippe
Danfrie.
Il faut avoir l’œil exercé pour distinguer tel type à tel autre,
mais comme les autres ouvrages de la série, celui-ci est très
pédagogique et il vous donne l’inventaire des différents types,
comme ceux de Granjon, par exemple : les capitales, les bas de
casse, les ligatures, les finales. Voilà l’art de main décodé
!
Cette nouvelle typographie sera contrefaite malgré le privilège
dont bénéficie Granjon pour 10 ans, et se diffusera rapidement, en
France mais aussi à l’étranger, notamment dans les pays du Nord.
Pourtant, le caractère de civilité ne parviendra jamais à
supplanter les lettres romaines. Il est d’un usage plus difficile
pour l’imprimeur, et le crénage des types les rend fragiles à la
presse.
Ce que le livre de Rémi Jimenes montre bien c’est la fortune en
dent de scie de cette typographie. A la mode de 1560 à 1620, elle
disparait presque complètement au XVIIe siècle, pour revenir en
force au début du XVIIIe siècle. Seule exception confirmant la
règle, le météore Pierre Moreau, qui invente une nouvelle
typographie tirée des arts de la main, selon une démarche proche de
celle de Robert Granjon. Mais il appartient à la corporation des
Maitres-écrivains et non à celle des imprimeurs et son expérience
sera vite brisée par ces derniers.
Le gothique cursif s’offre donc un come back tonitruant dans les
années 1730 grâce à Jean Baptiste de la Salle, le fondateur des
Ecoles Chrétiennes, qui publie en 1703 Les Règles de la Bienséance
et de la Civilité Chrétienne. Cette fois le pli est pris, il
deviendra difficile ensuite de publier un livre de civilité qui ne
soit pas composé avec ces caractères, sauf bien plus tard, lorsque
les éditeurs ne verront plus de motifs à suivre un style que plus
personne n’utilise et ne lit facilement. C’est l’âge d’or de la
civilité, plus de 200 ouvrages ont été comptabilisés entre 1703 et
1863 !
Les lettres sages et bien alignées de Granjon et de ses suiveurs
étaient principalement réservées aux textes officiels, aux
ordonnances, privilèges et autres épitres dédicatoires, mais le
Gothic Revival de la période suivante touchera surtout les éditions
populaires et la production de colportage : mauvais papier, souvent
manipulés par les enfants, reliures modestes (si on excepte le
maroquin bleu de Duru pour l’exemplaire du Baron Pichon des Règles
de la Bienséance !). Ces manuels faisaient coup double, celui
d’enseigner les règles de savoir-vivre en même temps que l’écriture
manuscrite. L’ouvrage montre bien les cousinages entre la
typographie de civilité et les manuels de calligraphie destinés à
enseigner l’art de bien former les lettres, la ronde et la
bâtarde.
On regrette juste que cette partie consacrée aux productions
proprement calligraphiques des Maitres-écrivains, les Louis
Senault, les Honoré-Sébastien Roillet, etc, ne soit pas plus
développée. Sans doute par ce que leurs ouvrages étaient plus
souvent gravés que typographiés.
A la fin de l’ouvrage un appendice donne un inventaire utile des
principales éditions de livres scolaires rédigés avec des
caractères de civilité, depuis les Règles de la Bienséance de JB de
la Salle, pour qui voudrait commencer une collection de ces
impressions pittoresques.
Impossible de traiter sur une seule page, fut-elle internet, de
toute la richesse du livre de Rémi Jimenes, Le mieux reste de le
lire. Bon, je vous laisse, et j’y retourne…
C'est un réel plaisir de vous présenter l'ouvrage fraîchement
paru de l'un des premiers lecteurs du blog, Rémi Jimenes. Son
ouvrage Les Caractères de civilité, Typographie et
calligraphie sous L'Ancien Régime, vient effectivement de
paraître à éditions Atelier Perrousseaux Editeur (29,50€), et il
est superbe.
J'ai déjà eu l'occasion de le
feuilleter pendant toute une soirée et j'attends avec impatience
d'avoir un peu de temps pour me plonger dans ce qui me semble déjà
être un nouvel ouvrage de référence sur le sujet. Mais pour vous
donner une première impression, c'est vraiment très très
intéressant même pour le non spécialiste que je suis. C'est très
bien écrit, et on se laisse porter par l'histoire dans l'Histoire.
J'aime beaucoup.
Rémi étant un fidèle du blog, il
a accepté de se prêter au petit jeu de l'entretien pour les
lecteurs du blog, afin de nous en dire plus sur lui, ses recherches
et son ouvrage.
Rémi, quel a été ton parcours
jusqu'à la parution de l'ouvrage?
Après deux
années de khâgne à Orléans et une licence d'histoire, je me suis
orienté vers un master en histoire du livre à Tours, au Centre
d’études supérieures de la Renaissance. J’y ai consacré mon mémoire
à la carrière de Charlotte Guillard, veuve des imprimeurs Berthold
Rembolt et Claude Chevallon. Je poursuis aujourd’hui cette
recherche en doctorat. Parallèlement je collabore au projet de
numérisation des Bibliothèques Virtuelles Humanistes.
Comment
l'idée de cet ouvrage a-t-elle germé?
À la fin de
l’année 2009, j'ai été mis en contact avec Yves Perrousseaux, qui
recherchait des photographies pour illustrer son Histoire de
l'écriture typographique. Comme je m'intéressais à l’histoire
de la calligraphie, il m'a demandé quelques renseignements sur le
sujet, avant de me proposer la rédaction d'un livre consacré aux
rapports entre typographie et calligraphie. Ce vaste sujet
dépassait de loin mes modestes compétences. Cependant, depuis
plusieurs années je rassemblais de la documentation sur les
caractères de civilité. J’ai donc proposé à Yves d’aborder les
rapports entre typographie et calligraphie à travers l’histoire de
la lettre de civilité.
Mais
que sont les caractères de civilité ?
Gravés par
Robert Granjon en 1557, les caractères de civilité imitent la
gothique cursive des secrétaires français de la
Renaissance.
Cette
typographie est surtout connue pour l’utilisation qu’en ont faite
les imprimeurs aux XVIIIe et XIXe
siècles : le caractère ne servait plus alors qu’à imprimer des
manuels de savoir-vivre et de bienséance, qui ont donné leur nom à
cette typographie. Mon livre rejoint ceux d'Yves Perrousseaux
dans la collection « Histoire de l'écriture
typographique ». Cette collection, bien connue des amateurs
comme des professionnels, rassemble des ouvrages de référence
copieusement illustrés. Les derniers volumes sont tous imprimés en
quadrichromie.
L'ouvrage
est en effet magnifique, qu'apporte-t-il à l'histoire des
caractères de civilité?
Plusieurs
auteurs s'étaient auparavant intéressés à l’histoire des caractères
de civilité. En 1966, Harry Carter et Hendrik Vervliet ont publié
en anglais un livre entièrement consacré au sujet. Leur livre, qui
recense les polices gravées à la Renaissance et étudie leurs
origines, demeure une référence incontournable. Il n'était bien sûr
pas question pour moi de « refaire » le Carter-Vervliet,
mais d’adopter une approche différente du sujet : d'une part,
en ne m'intéressant pas exclusivement au graphisme des caractères
mais à leur utilisation par les imprimeurs (pour quels textes?) et
à leur réception par le public (avaient-il du succès?) ; et
d'autre part, en élargissant le cadre chronologique de cette
enquête.
On connaît
bien l’histoire de l’invention de cette typographie, mais on
n’avait pas encore regardé précisément ce qu'elle devenait aux
XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cet élargissement du cadre
chronologique m’a permit de montrer que les caractères de civilité
disparaissent totalement des presses françaises dans la seconde
moitié du XVIIe siècle, pour ne réapparaître qu'en 1703 avec la
publication des Règles de la Bienséance et de la Civilité
chrétienne de Jean-Baptiste de La Salle.
Il m’a alors
paru intéressant d'interroger les causes de cette disparition et
les raisons de la «résurrection» de cette typographie en 1703.
Malgré leur apparent archaïsme, les caractères de civilité étaient
employés pour des motifs pédagogiques clairement définis.
Un autre
volet important de mon travail est sans doute la mise en relation
de la typographie avec l’histoire de la calligraphie. La variation
des modes calligraphiques en France du XVIe au XIXe siècle, le
passage de l'écriture gothique à la ronde, puis de la ronde à la
coulée et enfin à l'anglaise, a naturellement affecté l'utilisation
des caractères de civilité qui servaient non seulement pour
l’apprentissage de la lecture, mais également pour l’apprentissage
de la calligraphie. J’ai ainsi volontairement profité de l’occasion
pour donner quelques précisions sur l’histoire, finalement mal
connue, de la calligraphie française sous l’Ancien Régime.
Je présente
également quelques modèles d’écriture tirés non pas des grands
manuels d’Alais de Beaulieu, Saintomer ou Royllet, ces rolls-royce
de la calligraphie, mais tirés de petites brochures rares et peu
connues, celles qu’avaient précisément dans les mains les enfants
des classes populaires.
(...)
Article dans la revue Plume mars-mai 2011
Article de "La Marseillaise"
Le Pays de Forcalquier-Montagne de
Lure est ancré dans l'histoire de la typographie. Le
village de Lurs y accueille «Les Rencontres
Internationales de Lure», créées en 1952 par
MaximilienVox et, plus récemment, la
Communauté de Communes a été labellisée «Pays du Livre
et de l'écriture», dans le but de fédérer les professionnels du
livre et de leur donner les moyens d'exercer leur activité. Après
avoir habité Forcalquier, YvesPerrousseaux est maintenant installé à
Reillanne: «Actuellement à la retraite, j'occupe mon
temps, avec un plaisir certain,à réaliser une Histoire de
l'écriture typographique, en plusieurs tomes, de
Gutenberg ou 20' siècle». Le Bas-Alpin explique
qu'«une telle démarche n'avait pas été réalisée depuis les travaux
de FrancisThibaudeau au début des années
1920. Je veux transmettre, d'une façon didactique, ce patrimoine
culturel mal connu, en France du moins,qui a fixé à travers les
époques,les modes et l'évolution des techniques, la pensée de
l'homme dans le livre et d'une façon plus générale dans l'imprimé».
L'ensemble de cette Histoire de l'écriture typographique,
en plusieurs volumes,est conçu pour proposer une vision générale et
complète du sujet. C'est en quelque sorte une véritable
encyclopédie de la typographie,et c'est une première dans le
monde.«De gros problèmes de santé m'ont fait perdre plus de deux
ans,continue YvesPerrousseaux. Mais que les lecteurs
se rassurent : le troisième volume vient de paraître, le quatrième
est en préparation,il sera consacré au 19e
siècle...»
L'atelier Perrousseaux l'éditeur vient de s'offrir
une cure de jouvence et arbore, désormais un nouveau
logo, remis à jour de la première livrée créée
par YvesPerrousseaux à la fin des années
1960,dans le que l'on retrouve toujours le hibou,vénérable emblème
de la maison. Ce changement n'est pas uniquement cosmétique,
puisqu'il préfigure la nouvelle ligne éditoriale de
Perrousseaux pour 2011. En effet,outre les ouvrages de
typographie et de graphisme qui continuent d'être le
cœur de la collection, l'année qui vient verra arriver
également deux nouvelles sous-catégories au sein du catalogue:
Bandes dessinées et Internet. La collection Bandes
dessinées présentera des ouvrages d'analyse et de réflexion autour
du 9"art, point de convergence logique des thèmes chers à l'atelier
Perrousseaux (l'image et le langage) ; les deux
premiers titres,Entre l'élite et la plèbe de
Jean-NoelLafargue et L'espace blanc
entre les cases de StéphaneDeschamps, sortiront en fin d'année 2011. L'autre
nouveauté, la collection Internet, aura pour but
d'éditer des ouvrages de typographie adaptés et destinés aux
développeursWeb, répondant clairement à
des problématique en perpétuelle évolution. Les deux premiers
titres, qui traiteront de la Lisibilité de la typographie sur
Internet et des Grilles & de la
macro-typographie de la page Web,
signés respectivement par AurélienFoutoyet et Anne-SophieFradier, seront publiés à la fin 2011.
Article dans Tm rsi stm 2010-06
«L'écriture chinoise» _ Tel est le titre du septième
cahier de la collection KitabTabulae,
publiée sous la férule de StéphaneIpert,
directeur du Centre de conservation du livre d'Arles,
coédité par l'Atelier Perrousseaux. Il
s'agit de la traduction française d'un ouvrage rédigé en
anglais par OliverMoore.
S'il semble peu probable que l'écriture soit apparue en Chine à
l'époque néolithique (vers 6000'1700 av.
J.C.), on estime, en revanche, que la véritable
écriture chinoise émerge dans l'Etat Shang en 1200 av.
J. oc. Ce livre présente en conséquence un des plus anciens
systèmes d'écriture au monde. Il rassemble, de façon intéressante,
les principes de base du langage et ceux de la formation et de
l'évolution des caractères chinois. A partir de
nombreux exemples révélés par l'archéologie et le témoignage de
documents conservés dans les musées, l'auteur décrit
chronologiquement les principales écritures chinoises, toujours en
usage.
Enseignant actuellement l'art et la culture de la Chine à
l'Institut de sinologie de l'Université de Leyde,
OliverMoore a précédemment
œuvré au Département of Oriental
Antiquities du BritishMuseum. C'est un spécialiste de l'écriture, de
l'épigraphie et des objets en bronze chinois.
(...)
Aborder, par cette pertinente édition de base, le système
d'écriture propre à l'immense étendue géographique que représente
la Chine, cela invite à la réflexion, voire incite à
l'approfondissement.